Raisonnements non certains et changement de croyances, par Bernard WALLISER, Denis ZWIRN & Hervé ZWIRN
1. Introduction
Une des conclusions les plus largement admises de l’épistémologie contemporaine est négative : il n’est pas possible de trouver des fondements certains aux énoncés empiriques et aux raisonnements qui les affirment en évitant une régression à l’infini (trilemme de Fries). Le faillibilisme de Popper, bien qu’en accord avec cette thèse, considérait qu’une voie restait ouverte aux raisonnements purement déductifs - et donc certains - , celle de la réfutation. La thèse de DuhemQuine va pourtant pourfendre ce dernier refuge de la certitude : d’un point de vue logique, tous nos énoncés, empiriques et même logiques, affrontent collectivement le tribunal de l’expérience. Pour rendre compte des raisonnements scientifiques, Neurath [NEU 33] considère dès lors que « nous sommes des marins qui doivent reconstruire leur navire au grand large, sans jamais pouvoir le décomposer en cale sèche, afin de le reconstruire à partir des meilleurs composants ».
La conception de la rationalité des croyances se trouve ainsi déplacée de la question de leur fondement à celle de leur changement. Les croyances scientifiques sont des données initiales modifiées au fur et à mesure de l’expérience pour conserver la cohérence de l’ensemble. Le principe fondamental de cette modification, baptisé « maxime de mutilation minimale » par Quine [QUI 72], consiste, face à des réfutations expérimentales qui affectent collectivement nos croyances, à préserver celles qui sont le plus profondément ancrées. Considérant que l’on peut traiter de la même façon les croyances scientifiques et ordinaires, l’Intelligence Artificielle a développé plus récemment des théories des changements de croyances fondées sur cette maxime.
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