Après l'affaire VW, l'affaire Renault ? - suite 1
APRÈS L'AFFAIRE VW, L'AFFAIRE RENAULT ?Dans les notes ci-dessous des 22 et 25 Novembre et du 18 Décembre 2015, nous indiquions une probable extension de l'affaire VW à d'autres sociétés européennes - dont Renault.
On vient d'apprendre aujourd'hui que la Direction de répression des fraudes avait conduit plusieurs perquisitions dans les locaux de Renault, perquisitions liées au contrôle des taux d'émissions polluantes sur les véhicules fabriqués par le Groupe.Rappelons donc ici les principaux éléments de ce qu'il faut dorénavant rebaptiser le "Diesel Gate" :- le contrôle du respect des normes européennes est essentiellement "assuré" par des organes publics nationaux,- au niveau européen, un Comité d'experts nationaux (auquel participe un représentant de la Commission) procède à un "échange d'informations" non public sur ces contrôles,- les services de la Commission avaient à plusieurs reprises - en interne - alerté sans succès le collège sur les déficiences des contrôles nationaux,- devant la gravité potentielle de cette affaire sur le plan environnemental comme économique, le PE a décidé de créer une Commission d'enquête sur le "Diesel Gate".- la question de la supervision - au niveau européen - des organes nationaux de contrôle est dorénavant explicitement posée.Jean-Guy Giraud 14 - 01 - 2016
L'AFFAIRE VOLKSWAGEN FAIT BOUGER LES LIGNESLe Parlement Européen vient de décider la création d'une commission d'enquête sur l'affaire VW - plus justement rebaptisée "Diesel Gate" vu sa probable extension à d'autres sociétés.
Si le mandat de cette commission fait surtout référence à d'éventuels "manquements" de la part de la Commission, il mentionne également le fait que "les États membres auraient eu des preuves de l'utilisation de mécanismes d'invalidation avant l'émergence du scandale".En pratique est ici visé le comité d'experts nationaux compétent en la matière, comité au sein duquel les représentants des États membres auraient échangé des informations relatives à leurs pratiques respectives de contrôle des émissions. Les délibérations de ce comité (auquel participe la Commission) ne sont pas publiques mais il semblerait que des pratiques non conformes (ou laxistes) aient été régulièrement évoquées sans qu'aucune suite ne soit donnée.La commission d'enquête devra donc éclaircir ce point - si elle obtient, toutefois, communication des procès verbaux du comité d'experts. À plusieurs reprises, dans le passé, cette communication a été refusée au PE (voir ci-dessous).Enfin, il est intéressant de noter que le PE s'était préalablement prononcé - au sujet de cette même affaire - en faveur d'une"Autorité Européenne de surveillance" des agences nationale de contrôle (voir ci-dessous) .(Rappel : les services de la Commission avaient - en interne - alerté le collège dès 2011 sur cette question - voir ci-dessous)Jean-Guy Giraud 18 - 12 - 2015
L'AFFAIRE VW VA-T-ELLE FAIRE BOUGER LES LIGNES ?L'affaire VW va peut être faire bouger les lignes en matière de respect de la réglementation européenne et nationale dérivée.
La Commission vient en effet de déclarer officiellement que, en matière de certification du respect des normes de pollution dans l'industrie automobile, "the approval system of the member states has failed".En conséquence, "the Commission wants to monitor the national authorities that approve new cars before they are allowed on the market".On peut s'attendre en effet à ce que l'affaire VW s'étende à d'autres constructeurs automobiles (1) et que l'ampleur des dégâts environnementaux potentiels ainsi constatée oblige les Institutions à renforcer les contrôles de conformité, notamment en confiant leur supervision à un organe européen autonome.On retrouve donc ici le cas de figure constaté dans d'autres domaines tels que la supervision bancaire ou la sécurité aérienne (2) : les instruments nationaux de contrôle de l'application des règles ont été défaillants et n'ont pas permis d'assurer la protection de la sécurité ou des intérêts du public.À cette occasion, on a pu aussi découvrir que les comités (composés d'experts ou de responsables nationaux) sur lesquels s'appuie la Commission pour apprécier le bon fonctionnement des règles (et préparer leur évolution) servent surtout, en fait, à protéger les intérêts/entreprises nationaux - le cas échéant au préjudice du public. On a pu aussi relever la totale opacité des travaux de ces Comités que même la Commission n'est pas habilitée à rendre publics (3).Il est donc possible qu'à la faveur de ces différentes affaires, la Commission - poussée par le Parlement européen - soit amenée à re-penser entièrement le système actuel de contrôle d'application des règles européennes dans les domaines pouvant affecter directement la sécurité ou les intérêts du public.L'une des options à envisager serait celle de la création d'Agences indépendantes, analogues à celles qui existent dans les États fédéraux. L"Autorité bancaire européenne" créée en 2010 en réaction à la faillite de la supervision bancaire nationale pourrait être un modèle approprié.Jean-Guy Giraud 25 - 11 - 2015(1) Des constructeurs français - dont Renault - pourraient être bientôt impliqués.(2) Un problème similaire pourrait se poser en matière de sûreté nucléaire.(3) La commission TAXE du Parlement européen n'est pas parvenue à obtenir les compte rendus des réunions du comité d'experts/responsables nationaux compétent - au sein duquel ont notamment lieu des échanges d'informations sur le traitement fiscal des grandes entreprises par les différents fiscs nationaux.AFFAIRE VOLKSWAGEN : LES SERVICES DE LA COMMISSION AVAIENT PRÉVENU !Les lecteurs intéressés par l'"affaire Volkswagen" trouveront ici un extrait d'une note publiée le 22/10/2015 par le syndicat U4U de la fonction publique européenne d'où il ressort que les services de la Commission avaient fait en temps utile leur travail d'analyse et d'alerte sur la question de la pollution automobile.Il apparait donc que les responsables européens et nationaux étaient pleinement informés de cette situation.NB dans l'autre affaire de la "German Wings", il est également apparu que l'Agence Européenne de la Sécurité Aérienne avait prévenu les autorités allemandes des déficiences du système national de contrôle de l'état de santé des pilotes mais que celles-ci avaient refusé de prendre les mesures nécessaires.Jean-Guy Giraud 22 - 10 - 2015Note du syndicat U4U"Affaire Volkswagen: quelles responsabilités au niveau européen?"
"Le JRC avait déjà dénoncé l’inefficacité des mesures de pollution des véhicules.La fraude de Volkswagen n’est que la partie émergée de l’iceberg !Après la crise de l’euro, la gestion de la crise grecque, l’affaire des migrants, la persistance des problèmes économiques et sociaux, l’affaire Volkswagen doit nous inciter à conduire une réflexion plus large sur le fonctionnement des institutions européennes et des mécanismes de contrôle démocratique, pour les rendre plus efficaces et pour asseoir la crédibilité des institutions européennes sur une base solide. Ceci est d’autant plus important que les solutions aux défis actuels nécessiteront d’une façon ou d’une autre un renforcement des pouvoirs de l’Union. Nous attendons beaucoup de l’actuelle Commission, puisque J. -C. Juncker, notre président, est conscient de l’impasse dans laquelle se trouve pour le moment la construction européenne et des difficultés rencontrées par notre institution dans la gouvernance européenne.,Venons-en à l’aspect européen de l’affaire Volkswagen.L’Europe aurait-elle pu mieux faire?, Alors que l’UE et les gouvernements nationaux ont fait de la lutte contre le réchauffement climatique une priorité politique, ils ont renoncé à se doter des moyens pour mesurer efficacement le taux de pollution des véhicules., Dans un article de 2011, des fonctionnaires européens, scientifiques du JRC, ont noté :“On-road carbon dioxide emissions surpass laboratory emission levels by 21 ± 9%, suggesting that the current laboratory emissions testing fails to accurately capture the on-road emissions of light-duty vehicles. Our findings provide the empirical foundation for the European Commission to establish a complementary emissions test procedure for light-duty vehicles.”Cette étude visait l'ensemble des constructeurs, pas seulement VW.,La fonction publique européenne a fait son travail d’analyse et d’alerte,en pointant l’inefficacité des instruments de mesure des émissions polluantes et, en conséquence l’inanité des indicateurs de performance environnementale qui sont désormais obligatoirement affichés dans la documentation commerciale des constructeurs de véhicules.,En plus du CCR, qui a fait son travail, la DG Environnement n’est pas restée les bras croisés.Il en est de même du Commissaire de l'époque – Janez Potočnik - qui, dès mars 2011, disait haut et fort:,« One problem worth mentioning is certainly also the discrepancy between what we call "real world emissions" and the emissions under the standards. In recent years, there is increasing evidence that diesel cars, vans, buses and lorries have higher emissions under real driving conditions than those prescribed by legislation. This applies to newer EUROV/5 vehicles as well as to EURO III and IV. These differences can be enormous – in some cases up to 500% of the limit value in the type approval., We anticipate that the same will be the case for EUROVI/6 should we not be able to resolve this gap between the objective in the legislation and the amount emitted in reality. The result would be that a big part of the predicted air quality improvements expected through its introduction would be simply wiped out. (…), The Commission has recognised these problems and has already taken some action. In the Communication on Clean and Energy Efficient Cars, from April 2010, my colleague Antonio Tajani proposed how we could rectify this situation. This included the development of a new, global, and more realistic test cycle, the introduction of additional off-cycle tests, so-called portable emission measurement systems, and the introduction of anti-tampering provisions. For heavy-duty vehicles, these are now part of the type-approval legislation for EUROVI. For cars, I am working closely with Vice-President Tajani to ensure that the necessary technical developments are completed by 2013.”,Ajoutons que fin 2013, ledit Commissaire (avec son collègue de la Santé) avait proposé tout un train de mesures pour améliorer la qualité de l'air.A l’époque, le dossier avait été bloqué par le SG, le Collège sous la présidence Barroso et le Conseil.,De ce fait, les dirigeants européens, en négligeant d’agir à partir de ce rapport, ont participé à la tromperie du publicqui pouvait se sentir protégé par des normes et des indicateurs environnementaux. Le mythe du « diesel propre » est né de ces indicateurs fallacieux., Quelques semaines avant la Conférence des Nations unies sur les changements climatiques à Paris, du 30 novembre au 11 décembre 2015, il convient de se demander pourquoi ni les dirigeants européens, ni la presse européenne, ni les députés européens, pourtant prompts à réagir, n’ont su à l'époque se fonder sur les travaux impartiaux des scientifiques du JRC, ni suivre l’avis de deux autres DGs – Sanco et Environnement - pour dénoncer une situation directement contraire aux objectifs politiques affichés et aux attentes du public.,Sans doute, le désir de « protéger » l’industrie automobile européenne a-t-il joué,mais en définitive, les dégâts médiatiques conduiront sans doute à une perte de confiance du public dans la politique européenne pour une planète propre. Une occasion a aussi été perdue pour valoriser la fonction publique européenne. Il faudra aussi s'interroger sur le coût économique de la non-action, par exemple en terme de santé publique ou perte de recettes fiscales, car le problème ne se limite pas au cas de Volkswagen.,Les dirigeants européens, la Commission Juncker – celle de la dernière chance, selon ses propres propos - doivent prendre des actions fermes et rapides au niveau européen pour rétablir la confiance du public et enfin mettre en cohérence leurs paroles et leurs actes."