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Le journal d'Erasme

De l'influence française: la responsabilité des partis... et des électeurs! par Gilles Finchelstein (Fondation Jean Jaurès)

19 Mai 2014, 14:50pm

Publié par ERASME

"La France est notre patrie, l'Europe est notre avenir", chacun se souvient de la formule de François Mitterrand. Existe-t-il alors, dans cette Europe et dans ce Parlement européen, des sujets qui concernent d'abord la France en tant que telle ? La réponse est oui. Exception culturelle dans les négociations commerciales internationales. Défense de la politique agricole commune. Maintien du siège du Parlement européen à Strasbourg. Promotion d'une politique extérieure active - en Afrique et au-delà. Préservation, et même élargissement, du programme d'aide aux plus démunis - dont le combat pour les "restos du cœur" est le symbole. Sur tous ces sujets, et sur bien d'autres, il existe soit une sensibilité nationale, soit un intérêt national, soit un consensus national - au moins relatif.

Dès lors, l'influence de la France et de ses représentants constitue en soi un enjeu - pour faire valoir cette sensibilité, cet intérêt ou ce consensus, il faut peser au Parlement européen.

Pesons-nous au Parlement européen ? La réponse est oui. Parce qu'il s'agit de la France : pays fondateur, pays moteur, pays puissant, la réalité de notre influence excède l'image que nous en avons - ce n'est certes pas difficile. Parce qu'il s'agit des Français : deuxième pays le plus peuplé de l'Union européenne, nous comptons désormais la deuxième délégation en nombre de députés et l'écart avec l'Allemagne est même en train de se réduire (notre voisin perd avec ce scrutin trois députés pour arriver à 96).

Pesons-nous autant que nous le pourrions ? La réponse est malheureusement clairement non. Alors, quelles sont les responsabilités qu'il est possible d'identifier ?

Il y a d'abord la responsabilité des partis qui, dans le choix des candidats, ne mesurent pas toujours ce qu'il faut de qualité, de continuité, de compétence pour peser au Parlement européen.

Il y a ensuite la responsabilité des parlementaires qui, trop souvent, privilégient des fonctions visibles à des postes influents. Pour ne prendre qu'un seul exemple, les postes de "coordinateurs" sur les textes sont déterminants. Or, il y a eu entre 2009 et 2014, 25 coordinateurs Allemands, 21 Britanniques et... 9 Français - un de plus seulement que les Néerlandais ou les Portugais.

Il y a enfin - ô sacrilège ! - la responsabilité des électeurs eux-mêmes. La France se distingue par le nombre absolument hallucinant de listes présentées au suffrage des citoyens - le scrutin du 25 mai étant de ce point de vue là une mauvaise caricature, rendant un peu plus confus ce qui l'est déjà beaucoup... Mais la France se distingue aussi par la dispersion de ses votes et, surtout, par la dispersion de ses élus. Des différents courants trotskystes jusqu'aux multiples sensibilités souverainistes en passant par les chasseurs, nous avons le chic pour montrer aux autres Etats-membres que la France n'est pas seulement le pays aux "trois-cent-soixante-cinq fromages" qu'évoquait le général de Gaulle. Or, le Parlement européen fonctionne de telle manière que seuls quatre groupes exercent une réelle influence : les conservateurs du PPE, les socialistes de S&D, les écologistes et les libéraux de l'ALDE. Au cours de la dernière législature, une grosse moitié seulement de députés européens français étaient membres de l'un des deux principaux groupes, le PPE et le S&D. Chez nos grands voisins, ce pourcentage était plus élevé - 65% en Allemagne, 69% en Pologne - voire beaucoup plus élevés - 78% en Italie, 88% en Espagne. Moins nombreux là où il faut être présents, nous sommes ainsi moins influents que nous le pourrions.

C'est regrettable car, paradoxalement, le Parlement européen est, du point de vue idéologique, souvent plus proche de ce que nous défendons que les autres institutions communautaires. Mais ce n'est pas inéluctable : un peu plus de votes "utiles" de la part des électeurs et un peu plus de positions stratégiques de la part des députés et la France retrouvera l'influence qui doit être la sienne !

Source : http://www.huffingtonpost.fr/gilles-finchelstein/influence-francaise-union-europeenne_b_5348255.html

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